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Les interviews

Maxime Coudour et Fanny Imber, co-metteur·e·s en scène du Collectif du Prélude

Interview pour le livret de bord septembre-décembre 2020

crédit - Collectif du Prélude

Pouvez-vous nous présenter le collectif Le Prélude en quelques mots ?

FI : Ce collectif est né administrativement en 2017 mais l’aventure est plus ancienne. Il est né de notre implication dans l’espace public depuis 2012, de la rencontre de 4 ami·e·s et s’est appelé Prélude pour faire écho à notre première co-mise en scène, Le Prélude de Peter. Le Prélude, c’est aussi la mise en jeu avant le jeu, ce moment où ça a déjà commencé sans règles et sans en avoir l’air. Cela nous caractérise assez bien.

MC : Dans le Collectif du Prélude nous sommes deux metteur·e·s en rue : Fanny et moi-même. Très rapidement nous avons vue dans l’espace public un terrain de jeu parfait pour y faire raisonner des textes d’autrices et d’auteurs que nous avions envie de faire entendre. C’est une page blanche où tout est (presque) possible. Nous avions envie de créer une aventure collective, vivre quelque chose ensemble.

Après un diptyque d’adaptation de Molière (L’Avare puis Dom Juan), une adaptation d’un texte de l’auteure québécoise Carole Fréchette (Route 1), cette fois-ci place à Littoral de Wajdi Mouawad. Qu’est-ce qui motive vos choix de texte à adapter et particulièrement par cette nouvelle création ?

MC : Souvent les textes que nous choisissons sont issus d’élans, de discussions qui s’enflamment quand on est ensemble. Il y a l’envie d’un texte, d’un·e auteur·rice, d’un sujet qui va nous passionner et nous exciter. Il y a l’envie d’images et d’un dispositif unique qui donnera sens à son adaptation dans l’espace public.

FI : Il y a toujours des êtres et des textes qui traînent dans nos têtes et nos cœurs. Littoral en faisait partie. Il a ressurgi plus rapidement que prévu et s’est imposé à une période de repli et de restrictions. L’envie d’une épopée, longue à nombreux·ses est devenue essentielle à ce printemps 2020... La nécessité d’occuper l’espace public et de ne pas en faire un endroit de passage mais de vie encore plus prégnante. Dans Littoral, on dit à Wilfrid qu’il n’y a pas de place pour enterrer le père. Nous répondons, si, il y a de la place, nous devons enterrer les pères et choisir de partager ce que l’on nous a transmis. Voilà, nos choix de textes sont souvent un élan du cœur et des recoupements hasardeux que suscite l’instant présent.
L’Avare était né du croisement d’un dîner anti-crise et d’une envie de comédie simple, tout public, avec un désir de défi de jeu : le principe de la distribution au sort.
Dom Juan fut le fruit de la nécessité de poursuivre avec l’écriture de Molière, d’explorer les principes de la manipulation et ainsi expérimenter l’usage de barons (comédien·ne·s se faisant passer pour des spectateur·rice·s).
Route 1 arriva pour creuser le nouveau sillon d’une écriture contemporaine. C’est l’histoire de personnes qui courent après le désastre et se rendent comptent qu’ils ne savent pas où ils vont, mais que la nécessité réside dans le fait d’y aller ensemble.
Je crois que nos spectacles nous racontent…

MC : C’est exactement ça, nos spectacles racontent exactement l’état d’esprit de notre Collectif au moment où nous les créons. C’est pour ça aussi que nous faisons du spectacle vivant, nous bougeons régulièrement les lignes pour continuer à nous raconter sans jamais trahir ceux que nous étions à l’origine de nos spectacles. L’Avare que nous avons créé en 2012 n’est plus l’Avare que nous jouons aujourd’hui, mais il reste fidèle à l’esprit d’origine.
Parfois, il y a aussi des pièces qui reviennent régulièrement dans nos têtes, qui résistent car ce n’est pas le bon moment, pas le bon contexte, il reste des choses à digérer, à assumer. Et souvent ces idées reviennent, et arrivent au bon moment. C’est le cas de Littoral. Souvent évoqué, l’urgence de le monter n’apparaît qu’aujourd’hui.

Vous piochez vos textes dans un répertoire conçu pour le théâtre sur plateau en intérieur. Pouvez-vous nous expliquer les contraintes et perspectives qu’offre une réécriture pour l’espace public ?

FI : La réécriture pour l’espace public s’est faite très différemment selon les projets. Nos deux premiers spectacles prennent en compte les conditions d’un spectacle dans la rue, peu importe l’endroit. Il fallait qu’à n’importe quel moment de la représentation, le public puisse comprendre l’histoire malgré une langue ancienne et que n’importe quel accident de jeu ou d’incursion de la vie réelle soient pris en compte. Route 1, le troisième projet, a été pensé spécifiquement pour prendre place sur une route, y expérimenter la marche et la perspective sur 80 mètres.

MC : Nous voyons vraiment l’évolution de notre rapport à l’espace public à travers nos spectacles comme une « conquête ». Nous avons grignoté du bitume au fur et à mesure que nous assumions nos besoins d’espaces pour raconter nos histoires. C’est un défi de faire entendre du texte classiquement en salle dans la rue. Mais quand ce que raconte le texte, ce que font les comédien·ne·s ou ce que choisit de montrer la mise à scène a du sens dans la rue… alors la classification des répertoires devient absurde. Nous avons les moyens de faire entendre parfaitement du texte en rue. Je ne parle pas de connaissance technique mais scénique. Nous savons raconter des histoires et nous maîtrisons nos espaces de jeux. Quand tout s’aligne, il peut se passer des choses magiques.
Après, il est certain que si l’on souhaite recréer les conditions du jeu en salle, nous allons être battus par avance. Il faut accueillir ces contraintes comme des cadeaux et beaucoup de choses peuvent se débloquer. Jamais nous n’aurions pu courir sur une route de 80 mètres dans une salle.

FI : Littoral est pensé comme un voyage, d’un espace urbain à une terre ravagée pour finir sur un littoral. Il est là pour explorer trois types d’espace public et l’expérience d’une itinérance en trois épisodes. La durée de ce spectacle convoque aussi pour nous des lieux différents selon les heures de la journée.
Les contraintes de l’espace public sont nos perspectives.

Dans votre processus de création et de réflexion, vous semblez sensibles à la question de la place du spectateur. Pouvez-vous nous en dire plus ?

FI : Nous aiguisons dans nos créations ce qui nous anime le plus, et cette sensation originelle nous tentons de la faire vivre aux spectateur·rice·s. Pas seulement comme on reçoit l’émotion d’un autre, mais comme si l’autre devenait nous. Il s’agit de faire vivre ce que les personnages vivent. Dans l’Avare, celui ou celle qui se croit généreu·x·se ne l’est finalement pas, dans Dom Juan, on se rend compte que l’on manipule aussi vite que l’on peut être manipulé, dans Route 1, on vit ce que se mettre en mouvement collectivement veut dire. Dans Littoral, c’est le sentiment de participer à cette épopée, et la longue quête de Wilfrid devient une aventure commune.

MC : Nous ne faisons pas du théâtre immersif. Nous ne faisons pas croire aux spectatreur·ice·s qu’ils seront un personnage de la pièce. Néanmoins, sans 4ème mur, nous prenons en compte notre public dans la réalité du « ici et maintenant » de la représentation. Tout au long de nos créations nous nous posons la question de la perspective, à quel endroit devons-nous installer le public ? Comment l’accueillir ? Comment le faire entrer dans notre spectacle ? Comment s’adresser à lui ?
Ce sont presque des questions obligatoires dans l’espace public, mais dans notre façon de travailler ces questions-là se mettent au service des textes que nous défendons. C’est en y répondant que nous bâtissons une mise en scène, et non l’inverse, elles n’arrivent pas en bout de course.

Nous serons aux prémices de la création avec votre venue au Fourneau. Qu’attendez-vous de cette résidence et à quoi doit s’attendre le public qui viendra assister à vos expérimentations publiques ?

MC : En répondant à la précédente question, vous comprenez bien que nous avons régulièrement besoin de retour du public. De regards complices qui nous aident à répondre aux bonnes questions. Voir même à en susciter de nouvelles. Dès le début, nous allons être en recherche pour expérimenter une forme et une façon d’entrer dans le texte de Littoral et le raconter au mieux. Nous allons, nous même, être dans un premier contact avec la langue de l’auteur Wajdi Mouawad.

FI : Nous voulons travailler sur la distribution et sur les différents parcours des comédien·ne·s car il y a beaucoup de personnages. Il s’agira aussi d’un travail d’adaptation du texte et recherche autour du groupe. In situ, nous saisirons l’immense chance pour notre création d’être sur un littoral pour se gorger des particularités de ces espaces publics oscillant entre l’urbanité et la sauvagerie d’un Finistère. Le public peut espérer découvrir un texte et y projeter que l’épopée écoutée sera vécue.

MC : Nous aurons deux temps ouvert au public, à la fin de notre première semaine il sera plutôt question d’une répétition ouverte. À la fin de la deuxième semaine nous espérons être un peu plus dans le partage du texte de l’auteur. Tout reste à inventer, nous avons hâte de partager nos rêves.

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