Jacques Livchine et Hervée de Lafond du Théâtre de l’Unité
Interview pour le livret de bord septembre-décembre 2020
crédit - Théâtre de l’Unité
Plus de 50 ans de Théâtre de l’Unité, est-ce possible de vous présenter en quelques mots ?
Âge de la compagnie : 52 ans / Nombre de créations : 70 / Public touché : 878 452 / Livres publiés : 3 / Décorations : palmes académiques / Prix d’hygiène mentale / Prix Bruxelles des arts de la rue / Prix des étudiants à Paris en 1995 / Prix SACD Arts de la rue 2014 Prix du Crédit Coopératif / Un documentaire télé : au théâtre qui rue
Nos déménagements : Issy les Moulineaux (92) / Paris 20ème / St Quentin-en-Yvelines / Paris 11ème / Montbéliard – Doubs / Audincourt – Doubs.
Devise 1 : le Théâtre de l’Unité c’est toujours autre chose !
Devise 2 : le peuple peut se passer de théâtre, mais le théâtre ne peut pas se passer du peuple.
Devise 3 : invente ou je te dévore.
Devise 4 : rater mieux.
Que représente La Nuit Unique dans la grande histoire du Théâtre de l’Unité ?
Ne pas rester enfermés dans les cases habituelles. Pourquoi toujours 1h20 ? Pourquoi toujours assis en rang d’oignon ? Pourquoi ne pas mélanger tous les arts ?
Et puis aussi se raconter, nos amours nos vies. Et puis aussi celles et ceux qui nous ont marqué : Kantor, Pina Bausch, Bob Wilson… Et la musique, et les chants désespérés. Et puis aussi la poésie au-dessus de tout. Et se lâcher, tel un bateau ivre. Oublier la conformité sociale. Rechercher la transe de la nuit. Ne pas être économique, 14 personnes à payer. À faire voyager à coucher à dormir. Refuser le marché des solos, des duos.
Et aussi du texte…
Quelle est l’influence du format atypique (7h de représentation) et du contexte nocturne sur l’écriture de cette performance théâtrale inédite ?
Il y a une ivresse à traverser toute une nuit, nous nous libérons de tous les carcans sociaux, la fatigue engendre une liberté. Et nous pénétrons le sommeil du public couché.
Le matin certains nous racontent ce qu’ils ont vu, alors qu’ils ont rêvé. Il y a des insomniaques qui voient tout, et des ronfleurs qui ne voient rien du tout et pourtant leur corps est criblé de sensations bizarres. Il y a les intermittents du sommeil qui ratent la scène des nus à 3 h du matin.
Vous faîtes partie des pionniers d’un secteur artistique qu’on a nommé théâtre de rue puis arts en espace public, quel est votre regard sur l’évolution de notre secteur ?
Ça bouge, ça évolue, ça change. Ça suit le marché…
N’empêche que les artistes de rue sont sensibles au contexte social, ils aiment se tremper dans les populations. Bien sûr il y a dans les festivals mastodontes une perte de qualité de vie et une sur –consommation. Bien sûr chacun veut toucher des pros pour être acheté : question de survie.
Mais il reste encore un peu partout un théâtre de territoire, proche des gens et assez magique. Et dans le théâtre de rue, la carrière et la notoriété ne sont pas nos stimulants, nous sommes des « hors cases ». J’avais cru que la Covid allait engendrer une déferlante et un regain de la rue, ce n’est pas encore le cas. Il faut aller là où il y a du désert.
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