Interview de Patrice de Bénédetti, chorégraphe et danseur
Interview pour le Livret de Bord de janvier-juin 2018 du Fourneau
Crédit photo : Sylvie Bosc
Patrice de Bénédetti, danseur et chorégraphe
Vous êtes ici est ton deuxième solo de danse pour l’espace public, pourquoi ce choix de la rue et de la danse ?
Deuxième solo mais pas la deuxième fois que j’use mes baskets sur le bitume : je travaille dans la rue depuis 18 ans, j’ai la même énergie à chaque fois que je pars sur un projet. En cette période où le repli sur soi est roi, sortir exprimer ses idées, raconter des histoires, partager une émotion quelle qu’elle soit avec le passant, le public convié à 9h du matin devant un monument aux morts est plus que nécessaire pour moi, cela devient quelque chose de vital. Avec Jean, j’ai approché quelque chose que je n’avais jamais fait : mêler corps et texte, danse et théâtre. Deux disciplines antinomiques ! Du moins dans les rythmes de travail. Le résultat m’a tellement plu que je me lance sur trois spectacles suivant ce processus créatif. Vous Êtes Ici est le deuxième, il mêlera histoire intime et universelle à nouveau.
D’où part l’idée de créer Vous êtes ici ?
D’une absence, mais cette fois-ci pas une absence humaine, d’ailleurs l’absence du lieu où l’on vit enfant sur la carte de la ville n’est pas une absence, c’est une exclusion. Je suis né dans le 14ème arrondissement de Marseille, et avec le 15ème et le 16ème nous étions (en terme de population, un tiers de la ville) "absent" de la carte. Je revois très bien mon père déplier la carte, poser son doigt à 5 cm, sourire et dire : nous sommes ici. Puis parler de mes souvenirs d’enfants, comment notre quartier était pour nous une île, à des milliers de km de Marseille, le boulevard Plombière, une frontière infranchissable. Parler de sport, d’espoirs, de désillusion. Et quelque chose qui semble lointain dans le temps et l’espace se met à résonner avec l’actualité : dans les premières lectures publiques, certains y entendent les élans brisés des gosses des quartiers, d’autres ont des images de réfugiés.
Quel aspect de ta création viens-tu travailler à Port-Louis ?
Le texte est fini. Les matières de corps sont là, reste à chorégraphier et lier le tout, trouver le bon rythme. La scénographie, les accessoires de jeu ne sont pas encore validés, j’essaye encore des choses. Quand au dehors, j’ai beaucoup d’idées sur la place idéale où le spectacle devra se tenir mais rien n’est figé à ce jour…
Plus d’infos sur cette résidence à Port-Louis, dans le cadre du réseau RADAR.
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