Des retrouvailles chaleureuses à Kerbernard après le séjour du Groupe ToNNe dans le Grand Nord
A l’école les 9 et 11 juin 2020
L’équipe artistique du Groupe ToNNe est de retour à Brest en résidence de création au Fourneau depuis lundi 8 juin 2020 après un voyage dans le Grand Nord canadien. En mars 2020, Maude Fumey et Mathurin Gasparini, sont partis à la rencontre des habitants d’Arctic Bay pour les interroger sur les modifications de leur mode de vie liées au réchauffement climatique, cela avec l’objectif d’en faire un spectacle de rue. Une expédition extraordinaire malheureusement écourtée en raison de la crise sanitaire de la COVID-19.
Lors de leur présence à Brest, les deux artistes ont tenu à retrouver les enfants de l’école Kerbernard avec lesquels ils ont mené le projet d’éducation artistique et culturelle (EAC) : J’habite ici : de Brest à Artic Bay, de la Bretagne au Nunavut, afin de leur raconter les péripéties de cette aventure.
Mardi 9 et jeudi 11 juin 2020, Maude et Mathurin sont heureux de retrouver les enfants avec lesquels ils ont vécu un beau parcours artistique au cours de l’année scolaire 2019-2020. À leur arrivée dans la salle de classe des sourires se dessinent sur les visages des élèves de CM1-CM2 complices et de leur maîtresse Noémie.
Les deux artistes du Groupe ToNNe entrent vite dans le vif du sujet, ils expliquent aux enfants que les mesures sanitaires imposées en ce temps de crise ne permettront pas de réaliser la déambulation élaborée au mois de février en atelier théâtre dans les rues du quartier. Cependant, les deux acolytes de voyage ont des cadeaux souvenirs du Grand Nord à partager avec les élèves de Kerbernard. C’est avec plaisir que les enfants découvrent le livret de leur récit de voyage : Jours trop courts au Nunavut.
Page après page, les deux artistes racontent leurs pérégrinations aux enfants.
"Après une course contre la montre pour passer les frontières et plusieurs avions pour arriver jusqu’à Arctic Bay, nous avons été accueillis par l’équipage du bateau d’exploration polaire Vagabond, dont France Pinçon-du-Sel que vous aviez eu l’occasion de rencontrer en décembre 2019." commence Mathurin.
– > Lire le reportage "Le souffle du Grand Nord traverse Kerbernard"
Sur ce voilier pris par les glaces de la banquise, Maude et Mathurin rencontrent aussi le photographe spécialiste des pôles Christian Morel, arrivé à Arctic Bay depuis déjà deux semaines. Ce dernier est déjà inquiet à propos de son retour. "Pourrons-nous rentrer en Europe ? Combien de temps les frontières se fermeront-elles ?" Autant de questionnements liés à la crise sanitaire qui se propage dans le monde entier, mais Maude et Mathurin débutent leur voyage avec une certaine excitation et sont impatients de nouer des liens avec ce peuple du Grand Nord.
Maude raconte aux enfants que ses cheveux se cristallisent lorsqu’ils sont à l’extérieur de ses protections contre le froid.
Ils sont aussi saisis par le froid (moins 40 degrés à l’extérieur, 0 degré dans l’espace où ils dorment sur le bateau). C’est tout un quotidien bouleversé, fait de tâches routinières invraisemblables, qu’ils vivent sur le voilier polaire, comme briser la glace qui se forme sur les fenêtres à l’intérieur du bateau à cause de la condensation ou aller chercher de l’eau chaude dans une station pour qu’elle ne gèle pas durant le trajet retour vers l’habitacle.
Une photo des toilettes prise depuis le Vagabond. Maude raconte non sans un sourire que c’est tout une expédition, rien que pour aller faire pipi !
Dès les premiers jours, ils rencontrent les habitants d’Arctic Bay, la rumeur de leur arrivée se propage rapidement et les Inuits sont curieux de rencontrer les nouveaux venus. Ils ont à cœur d’échanger avec les deux artistes afin de remédier à certains a priori sur leur mode de vie.
"Nous ne vivons pas dans des igloos !" s’amuse une adolescente en découvrant une des questions posées par les enfants brestois. "Les igloos, on en construit seulement quand on va camper !"
Cette même jeune fille raconte à Maude et Mathurin que les Inuits vivent presque comme les occidentaux, ils ont des téléphones, des maisons, des écoles, etc. À quelques exceptions près tout de même puisqu’en poursuivant la discussion, elle conte aux artistes la manière dont elle a chassé son premier phoque à l’âge de 8 ans. Une histoire qui ne manque pas d’impressionner les enfants de Kerbernard qui ont presque le même âge aujourd’hui.
Gonflés d’inspiration grâce à ces premières rencontres, Maude et Mathurin sont vite coupés dans leur élan. En effet, le soir même on leur annonce que l’école fermera dès le lendemain et qu’ils devront désormais être en quatorzaine.
Ne pouvant plus se rendre au village, les artistes en profitent pour faire de longues promenades. À cette occasion, ils rencontrent Tom, un chasseur inuit du village avec qui ils échangeront un peu plus tard (en respectant les gestes protecteurs) lors d’une séance photo avec Christian Morel. C’est avec lui qu’ils auront la chance de voir une horde de chiens de traîneau balader leurs compagnons du Vagabond.
Ici, Christian Morel utilise une technique photographique de prise lente afin de capter la lumière qu’il propage autour de Tom à l’aide d’un tube lumineux. Durant ce type de séance, le photographe a l’occasion de rencontrer les habitants auxquels il offre les clichés en souvenir.
La crise sanitaire confine désormais le monde entier, c’est avec regret que Maude et Mathurin prennent la décision d’écourter leur voyage et de se rendre à l’aéroport, sans même avoir de billet, pour entamer leur voyage vers l’Europe, 5 jours avant le départ initialement prévu.
Sur le long trajet du retour, Mathurin est soucieux. Que va-t-il raconter dans son spectacle ? Les rencontres et les échanges provoqués par ce périple au bout du monde furent trop brefs. Il s’inquiète de ne pas avoir suffisamment de matière pour s’inspirer, écrire. Et pourtant, il en a passé des heures à étudier le pôle Nord, à lire les récits de voyage des explorateurs qui ont appréhendé cette région du monde, à écouter les témoignages de ceux qui y vivent aujourd’hui.
Mathurin raconte alors aux enfants de Kerbernard comment il a décidé avec l’accord de son équipe artistique, d’entamer un travail de création autour d’un de ces récits du passé qui l’a particulièrement marqué : l’histoire de l’aventurier norvégien Roald Amundsen qui fut le premier à traverser "Le Passage du Nord-Ouest" en 1905, ce passage est un espace maritime permettant aux navires de joindre l’océan Atlantique à l’océan Pacifique en passant entre les îles arctiques du Nord canadien, puis à travers la mer de Beaufort et la mer des Tchouktches. Ce projet de création abordera également les bouleversements environnementaux tout en se nourrissant de l’expérience de Maude et Mathurin à Arctic Bay. Une traversée qui amènera l’ensemble des artistes du Groupe ToNNe à vivre de nouvelles aventures !
Les deux artistes quittent l’école et les enfants sur une promesse de se revoir dans les rues de Brest ou d’ailleurs. En souvenir de ce beau projet, une photo grand format du village d’Arctic Bay a été affichée sur une bâche à l’entrée de l’école. Bien que la dernière partie du projet ait été bouleversée comme l’ensemble de nos vies ces derniers mois, les élèves de Kerbernard ne sont pas prêts d’oublier cette aventure artistique et humaine !
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